Expert judiciaire

Qu’est-ce qu’un expert judiciaire ?

Un expert judiciaire est un expert dans un domaine très spécifique à qui il est demandé de fournir au juge un avis sur des points techniques précis. Ainsi, l’avis de l’expert est un élément  parmi d’autres qui permet aux juges de se faire une idée sur un aspect de l’affaire qu’il examine. Et sur les indemnités à accorder.

Les listes d’experts judiciaires

Dans les régions, c’est au niveau des 36 cours d’appels que sont établis et mis à jour les listes la Cour de cassation pouvant intervenir à la cour d’appel et au niveau des tribunaux se trouvant dans le ressort de chacune des cours d’appel, en matière pénale et en matière civile.

Au niveau national, c’est  la Cour de cassation qui établit et met à jour une liste d’experts dans les différentes spécialisations.

La très grande diversité des domaines d’expertise judiciaire

 Les experts judiciaires sont des professionnels qui exercent dans des domaines très divers : médecine (par exemple pour remettre en question un avis d’inaptitude d’un médecin du travail) et psychiatrie (souvent en matière criminelle), mais aussi bâtiment, nuisances, aéronautique, … En fait, pour chacun des grands domaines, il y a une subdivision en un grand nombre de spécialités, pour lesquelles des experts judiciaires peuvent intervenir lors des procès.

Ainsi, pour ne prendre qu’un seul domaine à titre d’exemple : le domaine « Arts, culture, communication et médias » se divise en « écritures », « généalogie », « objets d’art et de collection ». Mais il y a encore une subdivision pour deux de ces trois sous-domaines. De plus, le sous-domaine « écritures » se divise entre « documents et écritures » et « paléographie ». Le sous-domaine « objets d’art et de collection » se divise entre « armes anciennes », « bijouterie, joaillerie, horlogerie, orfèvrerie », « céramiques anciennes et d’art », « cristallerie Ebénisterie étoffes anciennes et tissages »,  « ferronnerie et bronzes », « gravures et arts graphiques », « héraldique » et « livres anciens et modernes ».

L’expertise de service de la police ou de la gendarmerie

L’expertise peut aussi être demandée à des services de la police technique et scientifique, de la police nationale ou de la gendarmerie nationale. La liste de ces services est arrêtée par les ministres de la justice et de l’intérieur. Lorsque ces services sont sollicités, le nom des personnes de ces services chargées de l’expertise sont soumis à l’accord de la juridiction.

Pourquoi les juges ont-ils besoin des experts judiciaires ?

Les juges sont des spécialistes du droit, mais ils doivent pouvoir intégrer des aspects techniques ou médicaux dans l’examen d’une affaire. C’est pour cela qu’ils font appel à des experts judiciaires.

Les juges ne peuvent, bien évidemment, pas connaître toutes ces spécialités. C’est pourquoi, ils doivent faire appel à des experts judiciaires, lorsqu’une question relevant d’une spécialité professionnelle doit être éclairée pour faire avancer le jugement, les juges font intervenir un expert judiciaire inscrits sur les listes.

La mission des experts, précisée dans la décision ordonnant l’expertise a pour objet le seul examen de questions d’ordre technique. Elle est aussi cadrée au niveau du calendrier. Cependant, le délai fixé pour rendre le rapport d’expertise peut être prorogé par le juge à la demande de l’expert.

L’expertise judiciaire ne doit pas être confondue avec une décision de justice

Le rapport d’un expert n’a pas une valeur juridique qui s’imposerait. Il revient aux juges et non aux experts de juger.

Les juges n’ont donc aucune obligation de suivre les constatations ou les conclusions des experts. Cependant ceux-ci ont souvent une grande importance dans un procès.

Lorsque plusieurs experts ont été désignés et émettent des avis différents, ou des réserves sur des conclusions communes, chaque expert doit préciser et motiver son opinion ou ses réserves.

Désignation et contrôle des experts judiciaires 

Le missionnement par les juridictions

Dès lors que se pose une question d’ordre technique, toute juridiction d’instruction ou de jugement peut ordonner une expertise, à la demande du ministère public, à la demande des parties, ou parce que le juge le considère nécessaire. Le ministère public ou la partie qui demande une expertise peut préciser ses questions à l’expert.             

Les parties à un litige ont aussi le droit de contacter un expert qu’il soit inscrit, ou non, sur les listes de la Cour de cassation et des cours d’appel. Ce peut être par exemple, son propre psychiatre. Dans le cas où l’expert appelé par une des parties n’est pas inscrit sur une liste, il doit prêter serment devant le juge lors de son intervention dans une audience.

Lorsque le juge d’instruction ne fait pas droit à une demande d’expertise, il doit rendre une ordonnance motivée dans un délai d’un mois.

Surveillance du travail des experts judiciaires

Les experts effectuent leur mission sous le contrôle du juge d’instruction ou du magistrat désigné par la juridiction ayant décidé de l’expertise.

Le premier président et le procureur général de la cour d’appel surveille l’activité des experts inscrits sur les listes des cours d’appel. Il en est de même du premier président et du procureur général près de la Cour de cassation pour les experts inscrits sur la liste nationale.

Ainsi, le procureur ou le premier président veille à ce qu’il n’y ait pas de manquements à l’honneur et à l’honnêteté de la part d’un expert, ou à les sanctionner. Cela pourrait notamment se produire si un expert judiciaire rédigeait un rapport biaisé (non objectif) pour favoriser une des parties.

Les experts judiciaires doivent rendre des comptes

Les experts judiciaires doivent présenter tous les ans au premier président et au procureur général de la cour d’appel ou, pour les experts inscrits sur la liste nationale, au premier président et au procureur général de la Cour de cassation :

  • l’état  des rapports déposés durant l’année précédente
  • pour chacune des expertises en cours, la date de leur désignation dans une affaire, la désignation de la juridiction ayant pris cette décision ainsi que le délai imparti pour le dépôt du rapport
  • et les formations suivies dans l’année écoulée en mentionnant les organismes qui les ont dispensées.

Contrôle et sanctions possibles

Les experts peuvent, le cas échéant faire l’objet de mesures disciplinaires allant jusqu’à la radiation.

Les experts doivent remplir leur mission sous le contrôle du juge d’instruction ou le magistrat délégué. Ils doivent le tenir informé de l’avancement de leurs travail d’expertise et lui permettre de prendre à tout moment une décision utile.

Une partie à un procès peut, si elle en a une raison, formuler une plainte au sujet d’un expert. Pour ce faire, elle doit saisir ces magistrats par un écrit.

Comment sont rémunérés les experts judiciaires ?

La rémunération des experts est incluse dans le coût du procès. L’intervention d’un expert judiciaire est à la charge :

  • d’une des parties lorsqu’il s’agit d’un procès civil (une partie nécessiteuse peut obtenir l’aide juridictionnelle),
  • de l’État lorsqu’il s’agit d’un procès pénal.

Pierre Lacreuse

Sources : Loi n°71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires ; Décret n°2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires ; articles 156 à 169-1 du Code de procédure pénale ; articles 263 à 284-1 du Code de procédure civile ; articles R621-1 à R621-14 et R761-1 à R761-5 du Code de justice.

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Site Expert-juridique.fr. Page : Expert judiciaire. Mots clés : expert judiciaire ; Cour  de cassation, cours d’appel ; juges ; désignation des experts judiciaires ; contrôle des experts judiciaires ; rémunération des experts judiciaires